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Interview de KEK, créateur des “jeux chiants”, pour son 1er jeu sur iPhone : Piou Piou contre les cactus

Il y a

le

Célèbre pour son
blog qui vient d’ailleurs de
fêter ses dix bougies, Kek est aussi un programmeur acharné à qui l’on doit
notamment les “jeux chiants”, des casses-têtes pervers et prenants réalisés en
flash (regroupés sur cette page) et quelques autres jeux sur facebook. Pour
sa première incursion sur les téléphones mobiles, il lance cette semaine
l’adaptation de son Piou Piou contre les cactus (disponible
ici gratuitement sur l’App Store
), pensé à l’origine pour facebook.

L’occasion parfaite pour faire le point sur ses prochaines sorties mais aussi
évoquer les galères d’un développeur indépendant se frottant pour la première
fois à l’iPhone et à l’App Store :

Quelques mots sur Piou Piou contre les cactus :
il s’agit d’un jeu très simple, une course au score où il faut amener le pauvre
Piou Piou le plus loin possible sans trop se prendre de cactus dans la tronche.
La réalisation est très fluide, la tronche de Piou Piou est étonnante (surtout
lorsque vous lui donnez un burger à manger), la maniabilité est instinctive (on
tapote sur l’écran pour monter, basta) et le jeu n’hésite pas à vous enfoncer
si votre score est minable, dans le plus pur style des jeux de Kek.

iPhon.fr : Pourquoi avoir choisi Piou Piou pour ton premier jeu
sur iPhone ?
Kek :
C’est un jeu que j’avais déjà fait, c’était moins de
boulot. Du moins c’est ce que je pensais. C’est un petit jeu sympa, gratuit,
qui a bien marché sur facebook, donc c’était le client idéal pour un premier
jeu iOs & Android gratuit aussi. Et puis c’était un test : le jeu
était déjà fait, je n’avais qu’à me concentrer sur la conversion sur téléphone
pour voir comment ça marche. Et finalement j’ai passé plus de temps à l’adapter
à Android et iOS qu’à faire le jeu lui-même !

Quelles sont les contraintes d’adaptation d’un jeu
flash ?

Déjà les formats de résolution, car ce n’est pas la même sur tous les
téléphones. Sur iPhone il y a deux résolutions : Retina (iPhone 4) et
non-Retina. Sur Android, il y a en a un nombre hallucinant dû à la multitude de
téléphones différents qui existent. Ensuite il faut gérer la mémoire : il
n’y a pas autant de puissance sur un téléphone que sur un ordinateur fixe. Et
pour finir il a fallu que j’apprenne à mettre un jeu sur l’Android Market et
sur l’Apple Store. Et ce n’était pas une mince affaire.

Techniquement, quelles étaient les contraintes sur Piou
Piou ?

La première version que j’ai fait était en résolution Retina et ramait. Je l’ai
donc descendu à la “basse résolution”, celle de l’iPhone 3Gs, pour que la
fluidité revienne. Effectivement maintenant c’est plus pixellisé sur un iPhone
4…

Il ramait ? Mais pourtant c’est un jeu très
simple…

Oui, mais j’ai programmé à l’origine Piou Piou en Flash, que j’ai ensuite
converti en Air pour iOS. La plupart des jeux sur iPhone sont en fait réalisés
en langage natif de la machine, l’Objective-C, que ce soit Angry Birds ou
presque tous les autres. Du coup quand tu programmes un jeu en Objective-C, ça
tourne nickel, c’est fait pour ! En revanche quand tu fais des tests comme
moi, que tu demandes à Flash de convertir un jeu pour iOS, techniquement c’est
beaucoup moins optimisé. Donc Piou Piou n’est pas en résolution Retina parce
qu’il ramait grave. Piou Piou sur téléphone, pour moi c’est un test. Je connais
très bien Flash, donc c’était beaucoup plus simple pour moi de faire un jeu
dans ce langage et de le convertir, quitte à ce qu’il rame sur les plus vieux
téléphones. Mais je compte par la suite prendre le temps pour apprendre
l’Objective-C et programmer des jeux directement pour les téléphones. Ou peut
être qu’Adobe réussira à améliorer son convertisseur pour iOS (croise les
doigts).

C’est le même principe de conversion de Flash à l’iPhone et
Androïd ?

Oui ! C’est même un avantage. Quand un programmeur fait un jeu pour iPhone
en langage natif, une fois terminé, il doit quasiment tout reprendre à zéro
pour faire la version Androïd. Tandis que la conversion à partir d’un jeu flash
permet de ne pas tout recommencer. Bon, la conséquence est que c’est loin
d’être optimum sur iOS. J’espère qu’Adobe va améliorer ses outils de conversion
dans ce sens là. Mais comme l’entente entre Apple et Adobe est ce qu’elle est,
c’est pas gagné. Ca fait plus de 10 ans que je fais du Flash et on m’a toujours
dit “l’année prochaine ça n’existera plus”. Je pense qu’avec les smartphones,
ils trouveront un compromis bientôt.

Les Apple-addicts raillent souvent la multiplicité des écrans sous
Android alors qu’il n’y a que trois résolutions chez Apple (non-retina, retina
et iPad). Concrètement, c’est facile ou compliqué d’adapter un jeu à
différentes résolutions sur Android ?

Ca dépend. Il y plusieurs cas de figure. Imaginons que ton jeu fait 800×600 à
l’origine : sur Android et iOS on peut choisir de l’étirer jusqu’aux bords
de l’écran ou alors rajouter des bandes noires en haut ou en bas. C’est pas
idéal mais c’est mieux que l’étirement. La meilleure solution est que le jeu
s’adapte en fonction de la résolution d’écran, qu’il en occupe la totalité dans
tous les cas, et que les menus et boutons s’adaptent en fonction, cent pixels
plus à gauche sur tel machine, 25 pixels plus bas sur telle autre, etc. Je ne
te cache pas que c’est super chiant à paramétrer. Mais je suis en train de
développer une routine qui va faire ça tout seul sur tous mes prochains
jeux.

Qu’est-ce qui t’intéresse en tant que développeur de jeux sur ces
nouvelles plateformes que sont les téléphones ?

  Çaapporte plein de nouveautés en terme d’interactivité. Sur PC, il n’y a
pas d’écran tactile, d’accéléromètre, de GPS ou d’appareil photo ! Les
différents mouvements des doigts sur l’écran, zoomer, pincer, avec un doigt,
deux doigts ou quatre, faire défiler un écran, etc, ça ouvre aussi pas mal de
portes. J’ai envie d’exploiter toutes ces nouvelles possibilités pour mes
prochains jeux. Je vais pouvoir expérimenter. Pour ceux qui suivent mon blog,
ça fait un bout de temps que je n’ai pas fait de “jeux chiants” car j’avais
l’impression d’avoir fait le tour de tout ce qui était chiant à faire devant un
écran. Les possibilités qu’offrent les téléphones ou tablettes avec leurs
écrans tactiles me donnent un max d’idées de trucs chiants à explorer.

Il y a des jeux ou des applications déjà sortis qui t’ont
marqué ?

Quand j’ai vu Angry Birds, j’ai trouvé que
vraiment les concepteurs ne s’étaient pas fait chier. C’est un principe de jeu
qui existe depuis longtemps sur internet, et quand on connaît, ça saute aux
yeux qu’ils ont utilisé une librairie appelée Box 2D, qui existe depuis
longtemps et qui est ultra célèbre chez les programmeurs. C’est un moteur
physique ultra basique, où on crée des boules et des carrés en deux temps trois
mouvements et l’interaction entre eux est automatisée. Il suffit ensuite de les
remplacer par des cochons et des oiseaux… Mais bon, je ne nie pas le mérite
des mecs derrière Angry Birds, qui ont fait un jeu très joli et qui fonctionne
très bien. C’est juste que, en tant que programmeur, ça me scotche qu’un jeu
aussi facile et rapide à créer puisse cartonner à ce point ! Et je ne te
parle pas de Doodle Jump ! Mais en fait c’est génial que des jeux aussi
simples fonctionnent, ça me motive encore plus.

Qu’en est-il des jeux chiants ? Tu vas les adapter sur
téléphone ?

Bien sûr ! C’est même en cours ! Et ils vont vraiment tirer parti des
capacités de l’accéléromètre, du tactile ou de la webcam. Par exemple mon “plus
grand succès” des jeux chiants (disponible ici) consistait en un casse brique
où lorsque tu bougeais la souris, tu inclinais en plus une plate-forme en
dessous sur laquelle était posée une boule et qui ne devait pas tomber. Des
millions de personnes ont joué à ce jeu… notamment au japon. Je ne me
l’explique pas. Bref, la version pour téléphone aura donc une maniabilité basée
sur l’inclinaison de l’appareil. D’ailleurs ce jeu a déjà été pompé sur iPhone,
mais pas vraiment à l’identique, je le trouvais injouable. C’est à la fois
gratifiant et énervant.

On peut compter sur ces jeux quand ?
Je ne sais pas encore. Je réfléchis à comment les présenter. Ce sera sans doute
sous forme de package.

Et… comme Piou Piou, ils seront gratuits ?
Pour l’instant je monte une structure avec trois amis, dont une brute de
programmation de jeux vidéos et deux dessinateurs. On a envie de faire des
petits jeux vendus pas cher du tout mais amusants, sur iPhone et Android. Mais
j’ai toujours fait des jeux gratuits et je veux continuer à en proposer.
Sincèrement je n’ai aucune idée du succès qu’aurait un jeu comme Piou Piou s’il
était payant. Mais il est certain que j’aimerais idéalement vivre de ces petits
jeux et m’y consacrer à 100%.

Que penses-tu du modèle économique des jeux vidéos sur
téléphone ?

L’avantage est que 79 centimes pour un jeu, c’est rien. Et on peut très bien
passer 10h sur un jeu à 79 centimes comme on peut passer 10 heures sur un jeu à
50€. J’ai acheté il y a quelques jours plusieurs applications sur mon
téléphone, ça m’a coûté entre 50 centimes et 1 euro l’application, et je suis
content de ces dépenses car je sais qu’il y a du travail derrière. En plus j’ai
toujours eu une préférence pour les jeux auxquels tu joues rapidement dans le
métro entre deux stations, plutôt que ceux qui nécessitent des heures et des
heures. A quelques exceptions près certes. Mais il y a quand même une grosse
différence entre un jeu console style PS3 avec une durée de vie énorme, et un
petit jeu sur smartphone. Je me situe beaucoup plus dans cette branche là, je
ne pourrais jamais passer 2 ans ou plus sur le développement d’un
jeu !

Si on devait définir tes goûts de gamers, tu serais plus porté sur les
“concepts” donc ?

J’ai une grande source d’inspiration : les jeux Atari 2600. C’était ma
première console. A l’époque les mecs avaient 40 octets et trois couleurs
d’affichage pour faire un jeu et ils y arrivaient. Les graphismes et le son
étaient nazes, mais au moins ils se creusaient la tête pour trouver des
concepts en or et ça marchait. C’est comme ça que sont nés Tetris ou Pacman et
ces jeux sont encore d’actualité aujourd’hui ! Je peux sans problème jouer
quinze minutes à Pacman. Alors que des jeux qui ont trop misés sur leurs
graphismes sont aujourd’hui complètement dépassés. Enfin ça dépend des jeux, je
suis le premier à passer mon week-end sur Half Life… Mais ça fait deux ans
que je n’ai pas vraiment joué… depuis Far Cry 2 en fait. J’aime aussi les
jeux où tu peux faire ce que tu veux, comme GTA. Ca m’arrive d’y jouer une
heure sans faire de mission, juste en me baladant en ville pour tuer n’importe
qui, cramer des bagnoles, me faire arrêter par les flics, etc. J’aime bien
ça !

Tu évoquais la galère à mettre un jeu sur l’Apple
Store…

Ca commence par la galère pour tester son propre jeu. Sur Android, tu branches
ton téléphone à ton PC, tu uploades ton jeu sur le téléphone et hop tu peux
tester. Sur iPhone, tu dois passer par iTunes, virer la précédente version,
mettre la nouvelle, etc. Bref, c’est plus long. Mais ça va encore. Mais comme
je travaille sous windows, iTunes c’est vraiment tout pourri. Là où ça commence
à devenir chaud, c’est effectivement pour mettre un jeu sur le store. Sur
Android, ça prend dix minutes chrono : il suffit de rentrer des infos dans
un certificat, on upload sur le store, et hop c’est en ligne quasiment sur le
champ et tout le monde peut télécharger ton application. Sur l’App Store, il
faut avoir des certificats, entrer son mot de passe encore et encore… pour
finalement te rendre compte que tu ne peux pas mettre un jeu sur l’App Store
depuis un PC. Car oui : il te faut un MAC. J’ai cherché partout sur les
forums, c’est bel et bien impossible autrement. Désolé, je sais que je
m’adresse à des fans d’Apple, mais ça me conforte dans l’idée que cette société
a des pratiques sectaires, voulant tout regrouper chez elle. Ca n’a strictement
aucun sens d’être obligés de passer par un Mac. Du coup, pour mettre Piou Piou
contre les cactus en ligne, j’ai du squatter le Mac d’un ami… et donc me
retaper le certificat, car bien sûr il n’était pas transférable d’une machine à
une autre. Mais il était plus simple à faire sur un Mac que sur un PC, ça
j’admet.

Ca te pousse à ne pas aimer Apple ?
Je ne digère pas certaines pratiques comme celle que je viens de décrire ou
l’absence du support de Flash. Après ça, même si je ne les utilise pas, j’adore
l’iPhone, l’iPod Touch et l’iPad, car il faut reconnaître une chose primordiale
à Apple : leurs appareils marchent à la perfection. Et ça dans
l’informatique, c’est bien rare. L’absence de virus sur Mac aussi est
impressionnante. C’est vraiment de l’excellent boulot… Mais vraiment, être
obligé de passer par un Mac pour mettre une application sur l’App Store, c’est
complètement débile. Tiens d’ailleurs l’Objectiv-C dont je parlais plus haut
n’est disponible que sur Mac. T’es vraiment obligé d’acheter du Apple pour
faire du Apple. Et quand un simple cable USB Apple me coûte près de 20€, j’ai
un peu l’impression qu’on me prend pour un pigeon.

> Retrouvez sur l’App Store Piou Piou contre
les cactus
(iPhone, gratuit), mais aussi
le
blog de Kek
, son site professionnel et
ses jeux chiants en flash pour PC et
MAC
.

Pour encore mieux illustrer sa galère à mettre un jeu sur l’Apple Store,
Kek a également publié une planche BD sur son blog. Hop hop
on va la lire !
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Par : Keleops AG
4.4 / 5
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